Un enseignant débutant ou plus expérimenté peut être amené à se demander de quelle couleur il doit corriger les travaux de ses élèves. On entend souvent en salle des professeurs, durant les études ou dans les médias que « le rouge traumatise les élèves ». Pourtant, c’est encore la couleur dite conventionnelle pour annoter les copies.
Cet article vient apporter quelques réponses à cette problématique. Je vais d’abord présenter une synthèse des résultats de quelques études scientifiques à ce sujet puis je vous donnerai mon avis tiré de mon expérience professionnelle.
Que disent les études scientifiques ?
Corriger en rouge, une mauvaise idée ?
Assez basiquement et sans surprise, les études suggèrent que le rouge peut engendrer une perception négative de la part des élèves et même altérer leur motivation.
Il faut aller chercher les raisons à cela dans l’histoire de la couleur rouge. Petit point culture : le rouge existe depuis la Préhistoire, il s’est formé grâce à l’exploitation de minéraux comme l’ocre rouge et servait à peindre. Il s’agit d’une couleur primaire qui naturellement attire l’œil et a donc été associée aux éléments à mettre en valeur tels que les panneaux de signalisation. Elle peut alors traduire un danger ou un sentiment de colère.
Une étude menée par Rutchick, Slepian et Ferris (2010) affirment qu’à l’école, le stylo rouge est utilisé historiquement pour signaler les erreurs et les mauvaises performances de façon plus évidente puisque cette couleur attire l’œil comme nous l’avons démontré. Le rouge serait alors synonyme d’erreur à l’école.
Il est aussi affirmé dans la même étude citée ci-dessus qu’une copie restituée à un étudiant d’université qui serait couverte d’annotations rouges peut générer du stress.
Rutchick, Slepian et Ferris (2010) expliquent que, globalement, les enseignants tentent de se libérer de toute distraction lorsqu’ils corrigent : coupure des écrans, pas de lien avec l’extérieur, copies anonymes, correction en « petite rafale » pour limiter la fatigue. Mais malgré cela, lorsqu’ils prennent le stylo rouge, ils sont déjà biaisés d’après l’étude et prêts à repérer les erreurs. Ces chercheurs affirment que si l’enseignant corrige en bleu, il est plus indulgent et relève moins d’erreurs. L’enseignant qui corrige en rouge est alors plus sévère.
Des études psychologiques américaines indiquent que le rouge génère du stress inutile chez les élèves et que d’autres couleurs doivent être privilégiées pour garantir un environnement d’apprentissage plus positif et constructif.
Le rouge peut alors traduire l’échec et l’erreur d’après Elliot, A. J., Maier, M. A., Moller, A. C., Friedman, R., & Meinhardt, J. (2007). Le rouge peut aussi être synonyme de négativité, de stress et d’anxiété.
Soulignons le fait que les élèves utilisent eux-mêmes le stylo rouge pour mettre en valeur des concepts importants ou des définitions. Cela permet d’apporter une touche de couleur au cours et d’attirer l’œil encore une fois.
Le rouge peut alors faciliter l’accès à des informations ou des notions importantes, améliorer la vigilance et la concentration dans le travail.
Quelles alternatives au rouge ?
Pour corriger, la couleur noire est neutre et peu chargée émotionnellement sur une feuille, elle peut être envisagée pour annoter les copies.
Le bleu ou le vert sont des couleurs dites froides mais apaisantes. Corriger avec ces couleurs peut être perçu de façon plus constructive par les élèves.
Le violet, le rose ou l’orange sont des couleurs plutôt chaudes perçues comme créatives et stimulantes. Les utiliser pour corriger peut encourager la pédagogie constructive et positive.
On peut aussi songer à mettre en place un code couleur pour corriger : le bleu pour la grammaire et l’orthographe, le vert pour les suggestions d’amélioration et le violet pour les commentaires. Cette méthode est intéressante sur un plan pédagogique mais peut s’avérer chronophage à mettre en œuvre pour l’enseignant.
Indépendamment de la couleur utilisée, il est recommandé de fournir un commentaire constructif sur les copies. Pour cela, il faut essayer de formuler un commentaire positif pour souligner les points forts de l’élève et des conseils précis pour l’aider à s’améliorer sur les points plus négatifs. Un retour verbal peut aussi être envisagé lorsque les copies sont rendues afin de personnaliser encore davantage le commentaire et clarifier les éléments de correction.
La correction doit rester une opportunité de faire progresser l’élève.
Pour les plus petits à l’école maternelle ou élémentaire, on peut penser à l’utilisation de tampons smileys ou d’autocollants pour encourager davantage.
Mon expérience
Lorsque j’ai débuté, il y a bientôt 5 ans, je corrigeais systématiquement en rouge par convention et parce que j’avais souvent remarqué que mes professeurs corrigeaient eux-mêmes en rouge.
Puis, j’ai commencé à me questionner, à observer les copies que je rendais plus ou moins chargées en rouge. Je dois admettre que naturellement je n’aime pas trop cette couleur, je la trouve en effet agressive.
Au bout de ma première année d’enseignement, j’ai alors opté pour d’autres alternatives : le rose ou l’orange. Dès les premières copies rendues, les élèves le remarquent « oh Madame, vous avez corrigé en rose« . Cela déclenchait un sentiment joyeux davantage chez les filles que chez les garçons.
Depuis je corrige la plupart du temps en rose. Parfois en orange et quelques fois en rouge lorsque je n’ai que ce stylo sous la main.
Je précise que j’enseigne au lycée et que le choix de ma couleur de correction semble avoir un impact très léger voire inexistant selon les élèves. Eux-mêmes d’ailleurs écrivent en rouge les définitions ou mots importants lorsque je le signale. C’est donc bien que cette couleur ne les traumatise peut être pas tant que ça.
Je pense, à titre personnel, que l’impact est plus significatif chez les plus petits, à l’école maternelle ou élémentaire, entre 3 et 11 ans. En effet chez les enfants, le rouge peut traduire la punition ou le découragement. Chez les adolescents, le rouge peut être perçu comme de la sévérité ou un manque de reconnaissance, à des degrés divers selon l’âge et le développement émotionnel.
Je conserve quand même le choix du rose la plupart du temps pour une correction plus constructive et positive, même si l’effet est inconscient chez mes élèves.
Et vous, chers collègues, quelle couleur utilisez-vous et pourquoi?
Hello, j’ai mis en place un code couleur : vert pour l’étude de la langue et violet pour le reste ?
Bonjour, le code couleur est tout à fait adapté pour que les élèves se repèrent facilement. A vous de le mettre en place dès le début d’année dans vos cours et / ou sur les copies. Courage pour votre fin d’année scolaire.